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Le nouvel accord sur l'intermittence du spectacle



Le 28 avril 2016, les organisations syndicales et les employeurs du spectacle ont signé un accord historique sur les indemnisations des intermittents. L’idée de cet accord a été de « rétablir certains de leurs droits supprimés en 2003 tout en trouvant quelque 90 millions d’euros d’économies sur les 185 millions exigés par le Medef et la CFDT. » (1) Le Medef a trouvé que les économies réalisées étaient insuffisantes et a menacé de ne pas prendre en compte cet accord.


Du coup, le ministère a fait savoir qu’il était prêt à apporter 12 M€ complémentaires pour prendre en charge l’allocation journalière minimum, le traitement particulier des congés maternité et des arrêts maladies. (2)

Le ministère a annoncé que « le projet de décret sera transmis au Conseil d’État d’ici la fin du mois de juin et publié au journal officiel d’ici la mi-juillet. » (3)


C'est donc dans l'attente de la publication du décret au journal officiel que je vous propose de décrypter le calcul de l'allocation journalière tel qu'il a été proposé par l'accord du 28 avril 2016.

Ce calcul sera très certainement appliqué et, sans rentrer dans les détails des nouveautés (qui peuvent encore être soumises à modifications) sur les congés payés, le congé maternité, la retraite ou encore le plafonnement mensuel, j'espère apporter un éclairage sur les différences entre l'ancien et le nouveau système.

 

1/ Comment va se passer la première année d’affiliation ?


Le décret publié courant juillet précisera la date d'application des nouveaux calculs. A partir de là, votre date de première admission devient la date de réexamen du dossier. En effet, la grande nouveauté de cet accord est qu’il ne s’agira plus de regarder les heures effectuées sur 304 ou 319 jours mais sur 365 jours. Par conséquent, la date de réexamen du dossier sera la date de départ d’une nouvelle période de droits sur 365 jours (c’est ce que l’on appelait anciennement la date anniversaire.)


2/ Quelles sont les nouvelles règles d’affiliation à l’intermittence ?

2.1. Pour accéder à l'indemnisation chômage, les techniciens relevant de l’annexe VIII doivent réaliser 507 heures sur 12 mois, et les artistes relevant de l’annexe X doivent réaliser 507 heures sur 12 mois.

Donc toutes les heures de travail accomplies dans les 365 jours précédant la date d’examen des droits sont totalisées dès lors qu’elles répondent aux critères ci-dessous et qu’elles n’ont pas déjà servi pour une ouverture de droit antérieure.

  • Pour les salariés déclarés en heures, le plafond -chez le même employeur- est fixé à 10 heures par jour, 48 heures par semaine et 208 heures par mois, sauf dépassement autorisé ou clauses conventionnelles étendues.

Lorsqu’un salarié a plusieurs employeurs et à condition que chacun d’entre eux respecte ces plafonds, le plafond est augmenté de 20 % soit 12 heures par jour, 58 heures par semaine et 250 heures par mois.

  • Pour les salariés déclarés au cachet chez un même employeur, les cachets sont pris en compte dans la limite de 2 par jour. Lorsqu’un salarié a plusieurs employeurs les cachets peuvent être pris en compte dans la limite de 3 par jour. (maximum 28 cachets par mois)


2.2. Pour le décompte des 507 heures, les heures suivantes sont prises en compte :


3/ Comment va se calculer mon allocation journalière ?


3.1. Calcul de l'allocation journalière


Le montant de l’allocation se calcule en 3 étapes, à savoir :

  • Les salaires (A)

  • Les heures effectuées (B) au cours de la période de référence,

  • Mais aussi un paramètre fixe qui est l’allocation journalière minimale (C)

On les retrouve dans la formule : Allocation journalière = A + B + C.


Annexe 8 - techniciens :

Annexe 10 – artistes :

AJ = Allocation journalière

SR = Salaires de référence. Il s’agit des salaires inclus dans la période de référence.

Exemple :

Vous êtes un artiste de l’annexe 10 et vous avez un salaire de référence (SR) de 14 000 € et justifiez de 700h de travail au cours de la période de référence de 12 mois.

Pour A : [44 € x (0,36 x 13 700 € + 0,05 x 300 €)] / 5 000

A : 217 668 € / 5 000

A : 43,53


Pour B : [44 € x (0.26 x 690 h + 0.08 x 10h)] / 507

B : 7 928,80 / 507

B : 15,64


Pour C : 70 % de 44 €

C : 30,80 €


Donc AJ brut = A + B + C = 43 ,53 + 15,64 + 30,80

Allocation journalière brut = 89,97 €

Comparatif du montant d'allocation : ancien vs nouveau système

Le principe de la formule de calcul est similaire à celui de l’ancien accord. Seulement, la revalorisation de l’Indemnité Journalière minimale a un effet très positif sur le montant de l’Allocation Journalière brut. D’autre part, cette formule a un principe de progression linéaire jusqu’à un certain seuil de salaire de référence (14 400 €/13 700 €) et jusqu’à une certaine quantité de temps travaillé (720h/690h) au-delà de ces seuils la progression de l’indemnité journalière est plus lente.


- Au-delà de 690 heures, il faut 130 heures supplémentaires dans la même période pour que l’AJ augmente d’un seul euro.

- Au-delà de 13700 €, il faut 2300 € supplémentaires dans la même période pour que l’AJ augmente d’un seul euro.



3.2. Point de départ de l’allocation

ANCIEN SYSTÈME

  • Différé = [Salaire de la période de référence x Salaire journalier moyen] - 30

SMIC mensuel 3 x SMIC journalier

  • Le résultat est arrondi au nombre entier immédiatement inférieur

  • Un délai d’attente de 7 jours.

NOUVEL ACCORD

  • Différé = [Salaire de la période de référence x Salaire journalier moyen] - 27

SMIC mensuel 3 x SMIC journalier

  • Le résultat est arrondi au nombre entier immédiatement inférieur

  • Il n’est pas mentionné de délai d’attente. La franchise est répartie sur 12 mois prorata temporis.

3.3. Calcul du nombre de jours indemnisables par mois

Les règles en vigueur sont maintenues sauf pour les réalisateurs déclarés au cachet pour lesquels, le coefficient de 1,3 jour décalé est appliqué en fonction du nombre d’heures de travail effectuées à raison de 10 heures par jours.


Annexe 8 - techniciens :

J = (nombre d’heures travaillées au cours du mois x 1,4)

8

Annexe 10 - artistes :

J = (nombre d’heures travaillées au cours du mois x 1,3)

10


Nombre de jours indemnisables au cours du mois = (nombre de jours du mois – J)


Exemple :

Vous êtes un technicien de l’annexe 8 qui perçoit une allocation journalière de 75 €, déclare 24 heures de travail au cours du mois de novembre.

Nombre de jours potentiellement indemnisables en novembre : 30

J = 24 heures / 8 = 3 x 1,4 = 4,2

Nombre de jours indemnisables = 30 jours – 4 jours = 26 jours à 75 €.


Dès lors qu’un technicien effectue 26 jours de travail dans un mois calendaire, il ne sera pas indemnisé ce mois. Dès lors qu’un artiste ou un réalisateur effectue 27 jours de travail dans un mois calendaire, il ne sera pas indemnisé ce mois.

 

Finalement, le système de la période glissante et des 243 jours d'indemnisation n'existe plus et aura été une parenthèse de 13 années. Nous pouvons imaginer que cela va diminuer l'extrême précarisation d'un certain nombre d'intermittents.


A l'avenir, il conviendra d'observer :

1. d'une part, les économies réellement réalisées : « selon l'Unedic, les modifications donnerait entre 18 et 32 M€ d’économies et selon le comité d'experts entre 44 et 51 M€. »(2)

« L’Unedic pense que le passage à 507 heures sur 12 mois pour tous va coûter beaucoup plus cher que prévu. D’une part, parce qu’une partie des intermittents réduirait son temps de travail pour s’adapter aux nouvelles règles et d’autre part, parce que l’appel d’air vers de nouveaux entrants seraient sous-évalué. »(2)


2. d'autre part, la manière dont l’État prend en charge durablement une partie de ces économies : l’État s'est engagé à compléter à hauteur de 12 M€ le financement de ce système, ce qui rend l'assurance chômage tributaire des budgets de l’État et de l'alternance politique.


3. Et, enfin, l'équilibre général de notre secteur : cet accord existe grâce à de nombreuses concessions ; notamment, celle de la hausse des cotisations patronales. Nos structures et nos compagnies sont dans des difficultés financières multiples, il ne faudra pas que cet accord participe à créer encore plus de précarité.


Anne Souty




(2)Lettre du spectacle N°386 du 10 juin 2016 : L’État vers un compromis pour valider l’accord sur l’intermittence.


Autres sources :

- L'accord professionnel relatif à l'indemnisation du chomage dans les branches du spectacles signé le 28 avril 2016 par les organisations d'employeurs et les fédérations syndicales de salariés.

- Lettre du spectacle N°282 du 15 avril 2016 : Intermittence : la négociation entre dans une phase critique

- Lettre du spectacle N°283 du 30 avril 2016 : Intermittents : le pari du retour aux douze mois de référence.


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